Philippeville

Publié le par Michèle Pontier-Bianco

Détail de vague . Acrylique sur toile
Détail de vague . Acrylique sur toile

Rusicade des Romains

Philippeville pour nous

Skikda maintenant.

Pour les amoureux de la mer, Philippeville était considérée comme la plage de Constantine mais il fallait tout de même faire 82 km par la route ! Pour les oiseaux, une soixantaine.

La mer longe des montagnes et des dépressions ourlées de rochers et de plages.

Des copains courageux s'y rendaient en vélo ; le passage du Col des Oliviers (ou El-Kantour) était un grand moment.

On y allait été comme hiver quand le Dimanche, le temps s'y prêtait. L'été, ce n'était que la plage . Et le pique-nique ! L'hiver, on se promenait sur la corniche et les plages. Nos préférées étaient celle de Stora et l'immense plage de Jeanne d'Arc. Des petits ports d'Italie ou des Pyrénées-Orientales m'ont souvent rappelé le charmant Stora... Nous y avions un restaurant attitré dont le patron ressemblait à Raimu et il ne se faisait jamais prier pour nous interpréter la fameuse scène de Pagnol : " Tu me fends le coeur ! " .

Nos amis " Phili'villois " auraient pu nous reprocher de ne pas vraiment connaître leur jolie ville. Nous remarquions bien la Place de la Marine (Marqué) avec ses palmiers, les bâtiments officiels dont le style mauresque s'harmonisait si bien avec le paysage, sans oublier le théâtre, les monuments et leurs statues. Cependant, qui poussait jusqu'aux musées ou au Théâtre Romain ?

Mais il y eut un " avant " et un " après " les années noires... Pour cette ville qui nous était chère, l'une le fut particulièrement... Pendant de longues périodes nous étions privés de plage . Il y eut bien une embellie à laquelle nous voulions croire : " Cela allait s'arranger ! Une nouvelle ère de fraternité allait commencer ! " .

A tort.

La mer nous manquait tant que l'on organisa un convoi dominical protégé par deux camions militaires . Au point de ralliement, tout le monde était à l'heure ! Et les autos s'alignaient bien sagement derrière le camion de tête qui rythmait l'allure. Le retour s'organisait de même.

Avec le recul du temps, je me dis qu'il fallait avoir l'amour de la mer vraiment bien chevillé au corps... Cette vie n'était pas un western...

Et puis...il y eut " le-dernier-Philippeville " ...

Jamais son port n'avait dû voir autant de monde. Sur le Djebel-Dira ou l'Azemmour, on pouvait réunir 1300 personnes. Sur le Kairouan, 2630 passagers !

Partir par la mer est plus éprouvant que par l' avion. Ce dernier rend la coupure d'avec le pays natal, plus nette, plus radicale .Tandis que sur le pont d'un navire, les gens entassés dévorent des yeux la côte, pendant longtemps, longtemps...Jusqu'à ce que seul, un filet sombre ne soit encore visible au-dessus de la ligne d'horizon et ne finisse par s'engloutir dans la mer. La foule regarde encore le grand vide avec incrédulité, les appareils photographiques et les caméras figés, comme devenus inutiles.

Et c'est ainsi que nous avons remplacé les plages que nous aimions, par celles de Palavas ou Carnon ou La Grande Motte. L'eau a quelques degrés de moins mais c'est la même mer.

" Mare Nostrum " .

Et nos enfants recommencent les mêmes jeux sur le sable.

Et les grains de sable filent entre nos doigts comme les années qui passent...

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