La Médina et la Souika de Constantine - 1ère partie

Publié le par Michèle Pontier-Bianco

Intérieur de la Médina de Constantine - par Eugène Flandin - 1803-1876 - Peint en 1837

Intérieur de la Médina de Constantine - par Eugène Flandin - 1803-1876 - Peint en 1837

Médina et Souika - A vos loupes !

Médina et Souika - A vos loupes !

Quelques généralités 

Rares étaient ceux de mes camarades qui avaient  exploré TOUT Constantine. Ceux qui habitaient Saint-Jean ou Bellevue connaissaient naturellement leur quartier et les chemins menant au Lycée d'Aumale : la rue Caraman que prolongeait la rue de France ou la Rue G. Clémenceau que l'on appelait encore , Rue Nationale. Ils devaient cheminer entre " Les deux Squares " et traverser la Place de la Brèche pour atteindre le Centre Ville qui était en plein DANS la vieille ville. Nous rendions-nous compte que les grands et beaux immeubles devant  lesquels nous passions étaient en réalité dans la  Médina ? Ils avaient simplement occupé une surface dont les anciennes petites maisons avaient disparu ! Mais dans beaucoup de ruelles transversales pouvait subsister l'ancien habitat pour peu  que l'on s'écartât des rues principales citées plus haut !

Nous n'utilisions pas les termes de Médina ou Souika. On entendait parler de Médinas célèbres : celle de Marrakech ou celle de Fès qui serait la plus grande du monde (?) , oui, mais le mot  Souika nous était étranger  quand nous étions enfants. Nous parlions des  "vieux quartiers" ou des  "rues Arabes" tout simplement. Elles portaient les noms d'hommes célèbres pour leurs hauts faits ou , pour certains, leurs méfaits. Et nous  chantions fort innocemment : " As-tu vu la casquette du Père Bugeaud " ! 

Sur des maquettes de la vieille ville, je peux repérer l'endroit exact où s'éleva plus tard la maison que j'ai habitée, tout près de la Casbah.

J'ai eu le plaisir de découvrir la maison de mon enfance ! Nous louions au 3ème étage - Je ne m'explique pas la surélévation !

J'ai eu le plaisir de découvrir la maison de mon enfance ! Nous louions au 3ème étage - Je ne m'explique pas la surélévation !

En faisant cet article, j'ai eu l'heureuse surprise de trouver cette photo de ma maison. Elle avait six étages et le septième comportait une buanderie, des cagibis et un balcon circulaire. De là, on pouvait voir des anciennes maisons collées à la nôtre avec des terrasses et des toits qui auraient permis, peut-être, de passer de l'une à l'autre. Un détail pittoresque : quand approchait la fête de l'Aïd  el-Kébir,  il n'était pas rare d'entendre bêler un mouton ! Ce ne devait pas être une mince affaire de hisser la bête sur une petite terrasse ! 

Sous l'une des maisons proches de la mienne, il y avait un Café Maure dont les tables étaient sur le trottoir d'en face, collées au parapet qui dominait le ravin. On entendait le bruit caractéristique des dominos que l'on mélange : jeu traditionnel et éternel. J'y pense en voyant les cables électriques sur la photo. Ceux que nous avions couraient de poteau en poteau le long du parapet , en hauteur bien sûr. Mais un jour, alors que je faisais ma station sur mon balcon-belvédère,  un fil électrique cassa et, avec une gerbe d'étincelles et un gros crépitement, les deux morceaux tombèrent sur les clients du café ! Il y eut une grande clameur et , comme un seul homme, tous se jetèrent vers l'autre côté de la rue dans une envolée de burnous ! Par chance, aucune auto ne passa à ce moment ! Personne ne fut blessé mais quelle frayeur, pour moi aussi d'ailleurs !

La rue Damrémont n'était qu'à quelques maisons de mon boulevard et de là, on pouvait atteindre l'ancien Ghetto historique étroitement serré contre l'habitat musulman , on peut même dire que les maisons s'imbriquaient. Mais tous les habitants partageaient les mêmes marchés ayant une alimentation aux savoureuses recettes fort proches !

On reviendra plus tard sur les fameux marchés , celui de la place portant le nom du  Général F. de Négrier  et le Marché de la Place des Galettes. Je les ai vus tous deux plusieurs fois. 

On pourrait aussi parler de la Fontaine Sidi Djelllis, du martèlement métallique que faisaient les dinandiers du quartier et des "cris" des hérissons qui passaient de vie à trépas pour leur chair fine - (les Chinois en mangent aussi et on sait qu'ils aiment, en plus, les pangolins !! ) - mais je préfère m'attarder sur mon itinéraire préféré.

Dinandier Constantinois au travail

Dinandier Constantinois au travail

J'ai fréquenté le Lycée Laveran avant les classes secondaires, j'y ai suivi les deux Cours Moyens. Je n'allais pas encore seule aux cours et avec quelques camarades du quartier nous y allions accompagnées, soit par l'une des Soeurs de la Crèche, soit par l'une des jeunes filles qui y étaient employées. Le chemin normal était de passer par le magasin du Globe et descendre la Rue Clémenceau. Or nous étions souvent en retard ! L'accompagnatrice annonçait alors : " On coupe  par les rues arabes ! " (sic) . Nous descendions directement vers le Monoprix et prenions une ruelle qui le longeait. Nous étions ravies de pénétrer dans des rues pittoresques et même si l'on nous pressait de ne pas "lambiner" nous ne manquions  pas de regarder les boutiques d'artisans au travail. Celle du brodeur sur velours était la préférée. La vitrine des tissus de fête (satins, velours et brochés )  nous accrochait toujours ! Quand nous arrivions à l'arrière du lycée c'étaient des petits vendeurs de bonbons et sucreries diverses.

La Rue Vieux

La Rue Vieux

On pourra me dire que la connaissance que j'ai de la Médina est , en quelque sorte, "sporadique" : c'est vrai, mais je ne peux pas dire que j'ai ignoré ces lieux chargés de passé ...

Au sujet de la Souika, je suis moins bavarde mais j'ai vu la partie de la ville qui s'en approche et, d'autre part,  je suis allée SOUS le Pont de Sidi Rached : ce n'était pas si fréquent !!

Nous le verrons bientôt ...

A suivre ...

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