Vue du pont

Publié le par Michèle Pontier-Bianco

Dans la vieille ville    (Détail)
Dans la vieille ville (Détail)

Les vidéos actuelles de Constantine ne peuvent éviter les ponts ! On est frappé de voir la déambulation des piétons qui, parfois en rangs serrés, avancent en un flot continu. Si je parle (encore ! ) de l'un de ces ponts, celui de Sidi-Rached en l'occurrence, je ne peux m'empêcher d'y associer le paysage qu'il nous offrait, comme un film à épisodes. Ne l'empruntant pas quotidiennement, nous nous arrêtions souvent en des points stratégiques traditionnels. Pour nos promenades vers Sidi-Mabrouk ou le Chalet des Pins, nous descendions de la Place de la Brèche par le chemin le plus court, arrivant donc sur le côté gauche du pont. En contrebas sur un terrain plus que vague, se tenait une sorte de marché. Je ne sais à quel point il faisait partie des Béni-Ramassés, lesquels étaient plutôt associés aux Remblais. Je trouvais moyenâgeuse l'installation de l'arracheur de dents. Près de lui, des plateaux exhibaient les fruits des ses oeuvres douloureuses ! Les deux dernières années, ce lieu était une vaste brocante où les salles à manger Henri II côtoyaient des salons ou des chambres à coucher d'un Art Déco décrié car il n'était plus à la mode. C'est ce qui restait des maisons désertées, plus ou moins bien vendues, en vue d'un départ sans retour ...

Mieux valait regarder l'amoncellement des petites maisons s'étageant de cet endroit jusqu'aux hauteurs de la vieille ville avec, en fond, le rocher de Sidi M'Cid. On plongeait sur les terrasses qui se touchaient presque toutes. Les couleurs étaient belles. Les murs étaient parfois blanchis à la chaux ou de la couleur du pisé. Des chapelets de petits piments y séchaient. Les toits étaient de tuiles. Les fenêtres étaient entourées d'un badigeon bleu de cobalt clair dont on disait qu'il éloignait les mouches (?) . On racontait aussi qu'il portait chance. Qui saurait sa signification ? Des grands plats de purée de tomates s'étalaient sur les terrasses y ajoutant des notes de couleur vive.

J'ai pénétré une seule fois dans ce quartier où les " européens " n'allaient guère. C'était avec la petite équipe de la S.A.U. du Bardo. (Cf. art. En descendant vers le Bardo - 17-07-16) . Les ruelles étaient acrobatiques, les maisons s'accrochaient aux pentes. Nous devions voir un homme très malade. La maison était pauvre, minuscule mais bien rangée. Comme par magie, des cafés et des " gazzouzes " avaient fait leur apparition ! A notre départ, l'épouse et la fille aspergèrent d'un parfum entêtant les cheveux des cinq femmes que nous étions dans l'équipe : l'assistante sociale militaire et son interprète, deux " observatrices-venues-de-France " et moi.

Sur ces maisons ou sur les minarets, les cigognes avaient installé leurs nids grossièrement faits. C'était amusant de les entendre jouer des castagnettes avec leurs becs ou de les voir apprendre à voler à leurs petits. Les cigogneaux aux pattes raidies tentaient de décoller et retombaient piteusement sous l'oeil de leurs mamans ! A certaines heures, on pouvait entendre s'élever le chant des muezzins ; cela apportait une note de nostalgie.

Après les dernières maisons construites à l'extrême bord, commençait le vertigineux ravin dont nous tentions de voir le fond ! Lorsque nous avions franchi la grande arche, nous avions une vue plongeante sur l'Avenue de Roumanie et de niveau en niveau, le regard atteignait la gare (devant laquelle la statue de Constantin régnait en majesté) . Au-dessus de la voie ferrée, les pins et les eucalyptus faisaient une masse vert sombre que dominait le Plateau du Mansourah. Et nous aimions la franchir par une passerelle afin de continuer notre promenade par le chemin forestier qui la longeait. Au retour nous cheminions le long du ravin pour atteindre l'autre côté du pont ...

.............................. A suivre .............!

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