Djebel Ouahch
Le Djebel Ouahch (1200 m. d'altitude) était pour les Constantinois une promenade privilégiée.
C'était à la fois la réserve d'eau de la ville et son poumon vert. La forêt splendide conservait des essences rares et ses quatre lacs en étaient les miroirs. Je devrais dire trois lacs, car je vis presque toujours l'un d'eux vide. Comme tout le monde, je connaissais les lieux mais de façon limitée. On se promenait autour des lacs, on ramassait des pignons que la plupart des gens s'obstinaient à appeler " pistaches " (! ?) . On y faisait des pique-niques à la belle saison et on y venait l'hiver, quand il avait neigé, pour admirer le magnifique paysage.
Le garde-forestier et sa femme logeaient dans une maisonnette qui servait aussi de " buvette " .
Nous les connaissions. Après une hospitalisation, on me prescrivit une convalescence avec grand air et repos et je fus mise en demi-pension chez eux. Pour le " rat-des-villes " que j'étais, ce fut donc l'occasion de m'initier à une vie différente et bien mieux connaître les lieux !
Chaque matin je regardais Madame L. traire " la " vache et buvais du lait extra-frais. Dans l'étable, un moteur bruyant alimentait la maison en électricité ; pour l'économiser, on allumait des lampes à carbure que je considérais avec étonnement comme des objets préhistoriques ! Une odeur très spéciale s'en dégageait.
Deux fois par jour, le garde faisait sa tournée d'inspection avec son aide et ses deux chiens-loups ; (je m'étonne moi-même encore d'avoir pu, pour cette unique fois, m'habituer à ces animaux !!!). Il me désignait de sa canne les arbres remarquables ou les champignons plus ou moins cachés. Nous nous limitions aux coulemelles et aux bolets roses avec lesquels sa femme nous faisait de délicieuses omelettes. Les petits animaux détalaient à notre approche ; nous n'avons jamais rencontré de porc-épic, (j'ai lu récemment qu'il y en avait ...? ) mais bien des hérissons. (cf article " Places et marchés " 14-02-15) . Un jour, il fallut vider un lac, je pus voir les carpes énormes qui s'y trouvaient.
Je passais la sieste obligatoire dans une chambre fraîche à l'étage, en y dévorant des livres.
Avec la dame, je participais à la cuisine ou à la conversation avec les amis qui venaient les voir.Bref, je ne m'ennuyais pas. Mais l'été prit fin, il fallut reprendre les études après cette parenthèse mémorable dans ma vie.
D'autres temps vinrent aussi et la maison du garde fut fermée.
Dans les décennies qui suivirent, cette forêt connut bien des heurs et malheurs. Mais si le Parc d'Attractions a pu être inauguré de nouveau et si les gens ont respecté les écriteaux demandant de protéger la faune et la flore du Djebel Ouahch, sa merveilleuse forêt peut encore vivre et faire entendre le bruissement de ses millions de feuilles ...
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J'ai représenté ce lac car sa forme montre bien qu'il est artificiel. Les conifères semblent appauvris. (Encre sur papier A4)